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Mon top 5 des films de Clint Eastwood

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Comme tout le monde, la première fois que je vis Clint Eastwood, c’était avec son cache-poussière et son revolver Colt Navy, quelque part dans le désert du grand Ouest américain. Je compris alors que le personnage me passionnait au plus haut point. Accompagné de sa monture à travers les collines, ce grand blond au nez fin, au regard sévère et à l’allure nonchalante, m’inspira les désirs les plus fous de liberté et d’aventure. Evidemment, une fois la Trilogie du dollar passée en revue, je voulus découvrir le « Blondin » de Sergio Leone sous d’autres apparences. Je quittai alors les westerns un moment pour retrouver notre héros dans la vie agitée de San Francisco, dans une saga de films tous plus captivants les uns que les autres : Dirty Harry. Armé de son puissant magnum 44, l’inspecteur Harry brave les interdits de la police fédérale avec ses méthodes peu orthodoxes et expéditives, déjouant le plan de tous les serial killers intrépides. En clair, un personnage tout aussi génial.

Si nous connaissons bien l’acteur, nous connaissons peut-être moins le Clint Eastwood réalisateur. Pourtant, en 1968, il devient producteur avec la création de la société Malpaso et réalise son premier film trois ans plus tard : Un frisson dans la nuit. Ses créations se multiplient par la suite avec tantôt des navets oubliables, tantôt des pépites qui font honneur au grand cinéma américain. C’est ce dont j’aimerais parler aujourd’hui. Voici mon top 5 (subjectif) des films du cultissime Clint Eastwood.

Impitoyable (1992)

Comment ne pas mentionner ce chef d’œuvre du western avec un Clint Eastwood dans l’un de ses meilleurs rôles, accompagné de personnalités tout aussi géniales telles que Gene Hackman ou Morgan Freeman ? S’il est un chef d’œuvre, il est aussi l’un des westerns les plus sombres et les plus sanguinaires que j’ai pu visionner. William Munny, joué par son créateur, est un fermier veuf de l’Arkansas, qui peine à nourrir ses deux enfants, vivant péniblement de ses maigres récoltes. Il semble avoir tiré une croix sur son passé de criminel et de hors-la-loi jusqu’au jour où un homme lui propose une prime prometteuse pour abattre les auteurs d’un crime odieux. Munny saisit alors sa chance, avec tout d’abord une certaine hésitation, et redevient le tueur impitoyable qu’il fut.

A mes yeux, un film n’a jamais aussi bien porté son nom que celui-ci. Je retiendrai cette scène où notre tueur à gage se rend dans la maison close de la ville pour régler des comptes au shérif Little Bill (Gene Hackman), auteur de l’assassinat de son partenaire de route (Morgan Freeman). Le regard froid, glacial de Clint quand il franchit le seuil de ce saloon morbide, infesté de cowboys en rut prêts à en découdre avec n’importe quel lascar du coin, me fit hérisser le poil à plusieurs reprises ; d’autant plus pendant ses répliques lancées avec invective et un calme surhumain : « Exact… J’ai tué des femmes et des enfants. J’ai tué à peu près tout ce qui marche ou rampe à un moment ou à un autre. Et j’suis là pour te tuer Little Bill. » Un western qui fait froid dans le dos.

La relève (1990)

C’est sans doute l’un des films où je me suis le plus identifier à l’un des protagonistes. Un jeune adjoint inexpérimenté, David Acherman (Charlie Sheen), devient le co-équipier du grand vétéran de la police de L.A, Nick Pulovski (Clint Eastwood). Les deux acolytes s’embarquent alors dans une poursuite effrénée pour arrêter un criminel sans vergogne. Il s’agit d’un vrai film d’action, l’un des plus spectaculaires de Clint Eastwood sans doute. Il nécessita 88 cascadeurs pour le filmer au moment de la poursuite sur l’autoroute, l’évasion en vol plané, le monomoteur contre l’avion en réaction, et j’en passe.

De plus, le héros de La relève possède tous les attributs des grands personnages Eastwoodiens. Energique et taciturne, préférant l’action à la parole, ce policier d’élite affiche une vraie détermination et évolue avec aisance dans les dédales de la jungle urbaine. Un parfait contraste avec son associé David Acherman qui peine à s’affirmer au début du film. Il est tantôt raillé par une bonne partie de la police fédérale pour son amateurisme, ou tantôt humilié par les criminels eux-mêmes. On le voit par exemple hésiter au moment de presser sur la détente devant l’un d’entre eux, ce qui leur laisse l’occasion de s’enfuir avec Pulovski qu’ils prennent en otage. Mais ce qui est fort dans ce film, c’est justement l’évolution de ce jeune policier qui prend en maturité pour retrouver son co-équipier ; il tire donc leçon des fautes qu’il a pu commettre, et refoule son passé douloureux qui le privait jusque-là de confiance en soi.

Un monde parfait (1993)

Dans les années soixante au Texas, Butch Haynes (Kévin Costner, qui joue dans Les Incorruptibles) est un criminel en cavale prêt à tout pour la liberté. Dans sa folle échappée il prend en otage un jeune garçon, Philip, qu’il enlève à un foyer dans lequel son camarade de route s’était infiltré. La trame de l’histoire est à la fois originale et tragique : le ravisseur se lie d’une réelle affection pour l’enfant. Mais, évidemment, un homme se dresse sur son chemin : Red Garnett (Clint Eastwood), un flic encore une fois intrépide, dans le genre très Dirty Harry, avec une jeune co-équipière jouée par Laura Dern, que nous connaissons à travers ses divers films (Sailor and Lula, Inland Empire…).

Ce qui fait, à mon sens, tout le charme du film, c’est sans conteste cette relation entre deux êtres que tout semble opposé. Philip est encore dans l’âge de l’innocence et de la rêverie, confortablement installé dans son cocon familial. C’est alors qu’apparaît soudainement le truand Haynes, un homme plein d’assurance et de sang-froid. Mais c’est justement cette opposition qui lie les deux personnages : Butch Haynes crée à l’attention de Philip un monde imaginaire, et lui-même retombe en enfance. D’autant que les deux personnages partagent un point commun : ils n’ont tous les deux pas eu de père présent pour eux. Eastwood traite donc de l’éclatement de la cellule familiale à travers ce road movie de deux « enfants ». Le final poignant nous pend à la gorge, l’interprétation de Kévin Costner est remarquable de justesse.

Le maître de guerre (1986)

Ce film m’a fait replonger dans le style tout à fait similaire des Douze Salopards de Robert Aldrich. Des tranchées de Corée à l’enfer du Vietnam, le sergent Tom Highway (Clint Eastwood) a passé trente ans de sa vie au service de l’armée pour se voir très tardivement récompensé. Sa dernière mission : l’instruction de recrues. Il se trouve alors confronté à une garnison de jeunes désinvoltes, encadrée par des officiers trop ambitieux ou inefficaces. Tom Highway prend les choses en main et applique la même méthode que les autres avatars Eastwoodiens : la dure ! Alors que les entraînements touchent à leur fin, les Marines reçoivent l’ordre d’embarquer pour un obscur îlot des Caraïbes…

Là non plus, rien d’original (mais tant mieux), le sergent Highway est le digne successeur de Dirty Harry : ironique et franc-tireur, bourru et marginal à la fois. J’oserais dire que ce film est un archétype des films de Clint Eastwood, d’où son classement dans mon top 5. Dans sa réalisation sobre et classique se révèle l’héritier direct des grands maîtres. Il multiplie les confrontations et signe un film fort et réaliste, où l’action ne cède en rien à l’émotion.

Gran Torino (2008)

J’entends déjà les vives contestations de nos très chers puristes aguerris. « Comment ça, aurais-tu oublié Mystic River ? Comment es-tu passé du cultissime José Wales hors-la-loi ? » A dire vrai, je n’ai jamais pu finir le premier tant le scénario m’ennuyait, et pour avoir vu le second cette semaine, je pense que mon classement garde encore toute sa légitimité. Enfin, bien que ce choix ne soit pas des plus originaux, il me tenait à cœur de laisser une dernière place au film qui, à mes yeux, est le plus émouvant de la filmographie de Clint Eastwood : Gran Torino. Je suis rassuré de voir que senscritique.com confirme au moins ce choix.

Réalisé quatre ans après Million Dollar Baby, ce film marque le retour de Clint Eastwood en tant qu’acteur.Walt Kowalski, vétéran de la guerre de Corée, raciste et irascible, vient de perdre sa femme. Une nuit, il surprend Thao, un de ses jeunes voisins d’origine Hmong, en train d’essayer de voler sa Ford Gran Torino 1972, dans le cadre d’une épreuve imposée par son cousin qui tient un gang. Pour s’excuser auprès de leur voisin aigri, la famille Hmong décide de lui envoyer le jeune Thao pour exécuter des menus travaux de voisinage. Les rapports s’améliorent entre Walt et Thao et une réelle amitié naît au fur et à mesure du film. Ce dernier décroche même un emploi dans le bâtiment grâce aux conseils avisés de Walt, mais continue de se faire harceler par le gang qui sévit dans son quartier.

Qu’est-ce qui fait la beauté du film ? Probablement la relation au départ conflictuelle qui se construit entre l’ancien soldat et le jeune immigré. Sans vous spoiler, la scène finale est très parlante à ce propos. Walt, dans son testament, stipule qu’il lègue sa maison et ses biens à l’église, pour faire plaisir à sa défunte épouse ; et offre sa Gran Torino son ami Thao, au grand dam de ses propres enfants qui, tout du long du film, le considèrent comme un vieux sénile et impassible. Le dernier plan montre Thao qui conduit la Gran Torino sur une route au bord du lac Michigan, sur l’une des plus belles bandes originales du cinéma, écrite par Clint Eastwood lui-même.

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