Cinéma

The Square : La consécration de Ruben Östlund

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C’est toujours avec anxiété qu’on guette la sortie de la Palme d’Or de l’année : tout en l’attendant avec impatience, on craint d’être déçu par le lauréat du prix le plus reconnu dans le monde du cinéma. Pas d’inquiétude : The Square est excellent !

Ruben Östlund, qui s’était fait remarquer en 2014 avec Snow Therapy, nous présente ici Christian, célèbre conservateur d’un musée d’art contemporain de Stockholm joué par Claes Bang. Son musée s’apprête à exposer une œuvre soi-disant révolutionnaire, The Square, un carré de pavés de 16m2 délimité par des néons, assorti d’une plaque sur laquelle on peut lire : « The Square est un sanctuaire où règnent confiance et altruisme. Dedans nous sommes tous égaux en droits et en devoirs. » Autour de Christian et de cette trame centrale gravitent de nombreux personnages (ses filles, ses collègues) et de multiples intrigues.

Principal pilier du film : un humour acerbe et très critique. Le film s’apparente, surtout dans sa première moitié, à une comédie, tournant en ridicule le milieu de l’art contemporain, ses absurdités comme son hypocrisie. Le film alterne en effet des scènes où les responsables du musée partent en onanisme intellectuel sur la solidarité et l’altruisme (cf  les inscriptions sur le Square), et des plans de sans-abris implorant « Au secours », formule qui ponctue le film, et pour qui ces chers « altruistes » ne montrent aucune sympathie.

D’ailleurs, jamais aucun d’eux ne rentre dans le Square. Cette dimension du film prend une ampleur colossale lorsque ce même « Au secours » est prononcé par une femme de ce milieu bobo qui se fait presque violer pendant un dîner chic, ou par un enfant blessé dans un escalier, et que nos « altruistes » ne bougent pas non plus le petit doigt. On retrouve, sur un autre plan que dans Snow Therapy, une vision très noire de l’homme, et qui est d’autant plus noire que tout le monde se targue d’être altruiste. Tout ce résume à cette femme qui cherche à sensibiliser les passants à la cause des sans-abris, en demandant « Sauveriez-vous une vie ? », et recevant comme réponse : « Non. »

Mais le plus admirable dans ce film reste la réalisation de Ruben Östlund. Il  manie à merveille les mouvements de caméra, les lumières et la musique pour construire des scènes à l’ambiance très marquée et très différentes entre elles. Si le film comporte de nombreuses scènes comiques, il en surgit plusieurs fois des scènes instantanément très angoissantes sans que le rythme du film ne change : un tour de force ! Il en va de même pour des scènes de gêne extrême qui, si elles sont moins marquantes que celles de Snow Therapy, sont interprétées à la perfection. A cet égard, il faut saluer la performance de Terry Notary, qui interprète un rôle d’homme-singe (après avoir joué dans plusieurs opus de La planète des singes et interprété King Kong), et qui sort du lot dans un casting qui est pourtant de très bon niveau. On peut noter particulièrement les performances de Claes Bang et Elisabeth Moss.

Le film n’est certes pas irréprochable : il traîne en longueur à la fin et est parfois trop comique pour traiter son sujet sérieusement. Mais cela ne peut pas occulter une réalisation maîtrisée, des dialogues très bien écrits, des acteurs de haut niveau, des réflexions intéressantes, des scènes mémorables : The Square est un film magistral. Palme d’Or entièrement méritée !

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