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Artemis Fowl, bien trop peu de fowlie

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Artemis Fowl est un jeune garçon de 12 ans dont l’impertinence n’a d’égale que son intelligence. Son père est un marchand d’art très connu qui lui raconte sans cesse des histoires, issues du folklore britannique, mêlant fées et trolls jusqu’au jour où il disparaît et où ces contes semblent être vrais.

 

Ce très court film, qui dure moins d’une heure trente si l’on déduit le générique de fin, tout d’abord destiné aux salles obscures est finalement sorti directement sur Disney + du fait de la crise du coronavirus, qui a particulièrement affecté les cinémas. Mais il semble que la vraie raison de cette sortie soit ailleurs. En effet, de nombreux films ont été repoussés pour attendre la réouverture des salles mais celui-ci ne l’a pas été. La publicité liée à la mise à disposition de ce film de Kenneth Branagh sur Disney + a permis de mettre en lumière la plateforme avec une exclusivité alors qu’une sortie au cinéma d’un film aussi raté aurait été contre-productive dans la mesure où l’échec du film n’aurait pas été que critique mais aussi économique.

 

Malgré le fait que cette fiction soit l’adaptation d’une série de livres ayant eu beaucoup de succès et en dépit d’un budget estimé à 125 millions de dollars, on ne peut qu’admettre que ce long-métrage est raté. De fait, l’intrigue est peu intéressante et très linéaire tout en épousant parfaitement les canons des pires films hollywoodiens tout en ouvrant, bien sûr, la possibilité à une suite. Une tentative de récit cadre a été faite puisque un personnage secondaire, le « nain géant » Mulch Diggums, raconte l’histoire d’un point de vue extérieur jusqu’au moment où l’histoire rejoint le présent. Mais il n’y a plus aucune surprise lorsque les deux temporalités se rejoignent puisque le récit ne laissait plus aucune place au doute et donc plus aucune place au dénouement de l’histoire. Il aurait peut être, dans ce cas, fallu rester à un schéma un peu plus traditionnel et signer un honnête film familial plutôt que livrer une partition ratée.

Kenneth Branagh, qui a peu à peu délaissé la réalisation de films assez personnels pour des commandes de Disney et de grands studios, a décidé de faire reposer le film sur la prestation de Ferdia Shax, le jeune Artemis Fowl. Or si le jeune acteur de 12 ans n’est pas un modèle de cabotinage, il n’a vraisemblablement pas encore les épaules pour porter un film de science-fiction. Son jeu est trop timide alors qu’Artemis Fowl est censé avoir, comme son père, le sens du spectacle et une fierté sans pareil. La présence de Colin Farell, père d’Artemis Fowl, n’a que peu d’intérêt car il n’est que très peu présent à l’écran, puisqu’il disparaît pendant la majorité du film. Il joue toujours bien mais est, lui aussi, contraire à la description qu’en font les autres personnages, il est bien réservé et semble passer plus de temps à trier des papiers dans sa cave qu’à ne parcourir le monde pour son travail ou ses recherches. Judi Dench elle-même, ici générale des elfes, ne parvient pas à convaincre le spectateur qui a la mauvaise impression que M, de James Bond, a revêtu un drôle de costume afin de parodier son rôle de grande ordonnatrice des actes de l’espion des services secrets britanniques.

 

La réalisation de Kenneth Branagh est également bien trop sage. Le réalisateur à la caméra virevoltante de Frankenstein, en 1993, s’est absenté et n’a pas su utiliser son talent pour mettre en valeur ce récit. Les costumes des elfes et des autres personnages du monde caché des fées font penser à Arthur et les Minimoys, mais là où Luc Besson faisait un dessin animé réussi, Branagh ne montre qu’un panel de tenues assez ridicules et d’effets spéciaux plutôt grotesques.

 

Le visionnage d’un mauvais film n’est toutefois pas à déconseiller car il permet de mieux apprécier le film que l’on s’empresse de voir après… pour chasser les mauvais souvenirs.

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Mathieu Bonnet
Rédacteur en chef de la Cinemat'HEC pour l'année 2020-2021.

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