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Wick not Weak

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Le premier volet de ce qui est, pour l’instant, la trilogie John Wick est sorti en 2014 et remettait sur le devant de la scène un film d’action à l’ancienne fondé sur la vengeance.

Jusque là rien de bien novateur, mais cela a changé avec John Wick 2 et surtout John Wick : Parabellum, le troisième opus de la franchise.

 

 

A priori on peut voir en John Wick une énième variation autour d’un tueur retraité qui cherche à se venger parce qu’on l’a atteint dans sa nouvelle vie. Si Liam Neeson essaie de retrouver sa fille dans Taken (2008), Keanu Reeves est plus susceptible et cherche à retrouver sa voiture et à venger son chien.

Le premier volet de John Wick est donc, de ce point de vue là, un film d’action correct mais qui ne laisse pas un souvenir inoubliable. Néanmoins, une fois le film vu on a l’impression d’être passé à côté de tout un univers qui ne nous a pas été bien dévoilé. En effet, qu’est-ce que vraiment que l’hôtel Continental de New York ? Est-ce un hôtel de luxe mal fréquenté ou bien est-ce le QG d’un syndicat du crime ? Que représentent vraiment ces pièces d’or que Keanu Reeves distribue en échange d’un service ?

 

Ce sont à ces questions que répondent les deuxième et troisième long-métrages de Chad Stahelski en décrivant tout un imaginaire relatif à une mystérieuse confrérie internationale aux activités peu recommandables. Se dessine alors un fonctionnement pyramidal au sein de cette organisation criminelle qui trouve sa source en Italie et dans le Maghreb.

 

Le personnage principal, John Wick, est au départ une simple image, presque une caricature de l’homme qu’on ne laisse pas se retirer après une vie agitée. Mais contrairement à Liam Neeson dans Taken, ce personnage est approfondi au cours des films : on en apprend plus sur son passé et bientôt sur son futur, miroir de ses véritables désirs. John Wick cesse peu à peu, au cours des films, d’être un homme du passé. Pour les plus nietzschéens d’entre nous, on peut analyser ce changement du héros comme la fin du ressassement ainsi que l’apologie de l’effort et du dépassement de soi. En effet John Wick cesse d’être une ombre, il prend de la consistance en décidant de son futur : sa carte maîtresse, qui est aussi son unique carte, c’est lui-même et il met du temps à s’en rendre compte.

 

Les scénaristes ont réservé le même sort aux personnages secondaires. C’est bien le cas pour le personnage de Winston, le gérant de l’hôtel continental, et du majordome, dont on perce les secrets et les motivations qu’à la fin du troisième film. Le roi des rues de New York, The Bowery King, est quant à lui moins approfondi puisqu’il n’est apparu que dans le second film, mais le fait qu’il soit incarné par Laurence Fishburne suffit à nous contenter. En effet, l’association entre Keanu Reeves et Laurence Fishburne nous rappelle les meilleures heures du cinéma hollywoodien avec Matrix (le 1 évidemment, peut-être le 2 mais surtout pas le 3).

 

Néanmoins ces films ne sont pas exempts des pires accents du cinéma. Si l’on apprend que le personnage principal est Biélorusse, il s’avère que les protagonistes russes sont, malheureusement, réduits – comme souvent dans le cinéma américain – à une image dégradée et très caricaturale. Il est dommage d’avoir inclus cette dimension trop classique du cinéma hollywoodien qui présente les Russes comme des mafieux sans foi ni loi tout en se permettant de faire interpréter des Russes (ou des Biélorusses) par des personnes qui viennent d’un tout autre pays et qui ne parlent pas russe.

 

 

Malgré ce dernier, point, le bilan n’est ni weak ni équilibré. En effet, si le cinéma nous a, par de nombreuses fois, démontré que les suites sont moins bonnes que le film original, John Wick en est le parfait contre-exemple car chaque film s’efforce d’approfondir un univers et ses personnages afin d’obtenir un ensemble de qualité. On peut espérer que les deux films prévus pour continuer cette saga rendront l’ensemble encore plus solide et qu’ils la transfomeront en un monument du cinéma d’action.

Mathieu Bonnet
Rédacteur en chef de la Cinemat'HEC pour l'année 2020-2021.

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