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Persepolis, la force de l’histoire vraie

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MAKING-OF a le plaisir de recevoir Marjane Satrapi le 21 septembre à 18 heures en amphithéâtre Blondeau. C’est l’occasion de se replonger dans sa pièce maîtresse qui témoigne autant de sa vie que de son talent artistique : Persepolis. 

 

Persepolis est un long métrage d’animation sorti en 2007. Ce fut un grand succès critique puisqu’il reçut cette même année le Grand Prix du Jury à Cannes et qu’il fut nommé aux Oscars pour le meilleur film d’animation. Ce film marque le passage à la réalisation de Marjane Satrapi qui avait déjà fait de cette histoire quatre tomes de bande dessinée.

 

Cette histoire est autobiographique car elle raconte la jeunesse de Marjane Satrapi, une iranienne qui a reçu une éducation française à Téhéran et qui a fini par émigrer en France pour bénéficier de plus de libertés en temps qu’artiste. Ce film est un témoignage personnel et historique qui nous parle de la politique iranienne et de la révolution contre le Shah qui aboutit à la création d’une république islamique par l’ayatollah Khomeini et ses partisans en 1979. La famille de Marjane Satrapi n’a jamais connu le répit puisque proche du communisme, certains de ses membres ont été persécutés par le Shah tandis que d’autres l’ont été par le nouveau gouvernement. Dans son sillage, on peut se souvenir du film Nous trois ou rien de Kheiron dont l’histoire est similaire. Et bien sûr, ce film nous rappelle souvent les films d’Asghar Farhadi qui mettent souvent en regard la culture occidentale et la culture iranienne.

 

Techniquement ce film est irréprochable car il se sert du dessin animé, parfois associé au cinéma pour enfants, d’une manière qui est tout sauf naïve. Ce présupposé est déconstruit dès le début du film où l’on voit les bouleversements politiques et familiaux des années 1970 par les yeux d’une Marjane enfant. Mais ce dessin animé est tout sauf comique est joyeux, ce que nous rappellent les figures en noir et blanc ainsi que le minimalisme des représentations. La vie de Marjane ne fut jamais facile, entre destruction familiale, diminution des libertés et l’horreur de la répression, ce film est un juste témoignage de ce que vivent de nombreuses personnes dans des régimes autoritaires.

 

Il n’y a néanmoins aucun manichéisme dans ce long-métrage qui ne cache pas les bienfaits et les méfaits de chaque type de gouvernement. L’exil de Marjane quatre ans à Vienne n’est d’ailleurs pas sans montrer les failles du système de l’Ouest où l’individualisme laisse certaines personnes à la rue contrairement au régime islamique de l’Iran. Le contraire est vrai au niveau du libéralisme social qui est fortement amoindri dans le pays d’origine de l’auteur. La privation de contenus musicaux, de films, de livres bride la jeune Marjane qui, pour s’épanouir doit quitter le pays et aller vers des contrées où la création est moins contrainte.

 

S’il faut retenir quelque chose de ce film c’est bien que, au-delà du régime politique, c’est l’homme qui décide de sa conduite à tenir. En effet, tant à Vienne qu’à Téhéran ou à Paris, chacun est libre de ses actes et peut, comme le dit si bien la grand-mère de Marjane, « rester digne et intègre à soi-même ».

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Mathieu Bonnet
Rédacteur en chef de la Cinemat'HEC pour l'année 2020-2021.

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