Cinéma

Signs – Retrouver la foi

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Signs est un OVNI dans l’univers des films d’invasion extraterrestre. Sorti en 2002, il porte un autre regard sur les attaques extraterrestres. Loin des grandes villes ou des métropoles, l’œuvre de M. Night Shyamalan se déroule sur 3 jours dans la pure tradition grecque et suit la famille Hess. Graham Hess (Mel Gibson), le père, est un pasteur qui a perdu la foi depuis la mort de sa femme lors d’un accident de la route. Morgan et Bo sont les enfants de Graham. Merrill (Joaquim Phoenix), ancien grand joueur de baseball, est le frère cadet de l’ancien pasteur. Suite à la découvertes d’immenses agroglyphes  dans leurs champs de maïs, Graham et Merrill croient en un canular, mais comprennent vite qu’ils sont les signes d’une invasion extraterrestre et doivent progressivement affronter la réalité.

La peur est omniprésente dans Signs. Elle provient de l’ambiance créée par la réalisation de Shyamalan : les nombreuses scènes de nuit, les bruits de pas, les champs devenus labyrinthes, la seule lumière de la torche, la célèbre musique de James Newton Howard et les quelques jumpscares font du film une véritable référence dans le traitement de la peur. Cette dernière naît de l’imagination du spectateur plus que par les images mêmes. La scène du garde-manger incarne parfaitement la vision de Shyamalan. Alors que Graham sait qu’un alien se situe derrière la porte, il décide de regarder dans le reflet du couteau en le passant sous la porte pour tenter d’apercevoir la créature. Le plan nous fait longuement chercher avec le père de famille la présence extraterrestre, et participe à l’angoisse grandissante des spectateurs. De même, lorsque la famille Hess se barricade dans sa maison, la peur naît des bruits de pas de l’alien à l’étage et autour de la maison. Les plans suivent les bruits de l’alien à travers le mur, sans le montrer donc, et font travailler notre imagination, procurant par là une frayeur plus grande. Une séquence mythique toutefois marquera le film. Alors que Merrill regarde la télévision et découvre peu à peu l’étendue de l’invasion extraterrestre, une vidéo amateur d’un anniversaire d’enfants est diffusée à la télévision. On y voit des enfants hurler et lentement tous se diriger vers la fenêtre pour regarder en direction d’un buisson. La tension monte doucement et on suit les réactions de plus en plus fortes du frère de Graham. Puis surgit alors l’alien parfaitement camouflé dans le buisson. Ce slow burn marque le changement de vision de Merrill sur la situation, lui qui croyait à un canular, et révèle le principal atout des aliens : leur capacité à se camoufler et à se dissimuler.

Mais Signs est avant tout une œuvre sur la quête de sens et la foi, non pas uniquement chrétienne, mais en général. Dans les premières scènes du film, la trace de la croix retirée du mur symbolise la perte de foi du personnage joué par Mel Gibson. D’ailleurs, il ne croit pas dans un premier temps à une invasion extraterrestre : il ne croit plus en rien. Le souvenir clair de sa femme lui adressant ses derniers mots – « Swing away Merrill » – le hante constamment, pourtant ce sont ces mots qui lui font comprendre la solution lors de la confrontation finale avec l’alien. Dans la grande tradition shyamalanesque, ce sont ces apparents petits détails, ce premier véritable signe, qui s’avèrent les plus importants. Si Merrill n’avait pas décidé de rester vivre avec son frère Graham suite au décès de sa femme, s’il n’avait pas été un ancien champion de baseball, si Graham n’avait pas finalement accepté de laisser son cadet l’aider, si Morgan ne souffrait pas d’asthme, la famille Hess n’aurait sans doute pas survécu à l’invasion. Tout le message du réalisateur est là : la vie est remplie de signes, aussi insignifiants soient-ils, mais ils sont pourtant tous porteurs de sens.

L’invasion permet à Shyamalan d’incarner avec les différents membres de la famille la peur face à la vie, la peur de ne pas pouvoir protéger sa famille pour Graham, la peur de ne jamais être considéré comme assez bon pour Merrill. Mais cette épreuve de la peur est présentée comme une occasion de regagner espoir, de faire face à la vie et de toujours se relever. La scène finale en plan séquence montre la chambre de Graham reconstruite après l’attaque et révèle la reconstruction intérieure du père de famille redevenu pasteur comme sa tenue l’indique. Les épreuves façonnent l’Homme et mettent à mal sa foi, mais Shyamalan le montre, elles sont une nécessité.

Signs témoigne d’une réalité ancrée dans chacun des films de Shyamalan : certains phénomènes nous dépassent. Pour autant, il ne s’agit pas de les laisser nous renverser, mais au contraire, ils nous façonnent continuellement. Tomber puis se relever, détruire puis créer.

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